Association Internationale pour la Recherche en Didactique du Français

A propos Association Internationale pour la Recherche en Didactique du Français

L’association travaille à la reconnaissance de la didactique du français comme champ de recherche à part entière et comme discipline de formation.

Au cours de l'existence de l’association, un certain nombre de problématiques centrales se sont cristallisées, que l’association a d’ailleurs contribué à faire émerger, à préciser et à travailler à travers ses congrès, colloques et journées d’études. Sans être exhaustives, ces problématiques semblent correspondre à des préoccupations qui traversent les nombreux champs d’études des chercheurs en didactique du français langue maternelle.

    Mettant en cause le carcan étroit des genres scolaires abordés dans l’enseignement du français, de nombreuses recherches ont exploré la possibilité et les effets du travail sur des types ou des genres de textes plus proches des pratiques sociales et culturelles extrascolaires. Sur la base du postulat, communément accepté, de la nécessité de diversifier les écrits – postulat qui découle de la finalité générale assignée à l’enseignement du français depuis les années 1960, à savoir de développer les capacités de communication –, de nombreuses questions de recherches sont actuellement ouvertes dans ce contexte : quels genres faut-il travailler à l’école ? Comment construire des progressions à travers la diversification des genres ? Quel est le rapport entre les pratiques langagières sociales et les pratiques scolaires (problème de la transposition) ?

    Gérer la diversité des publics du cours de français requiert, d’une part, un enseignement différencié, qui adapte les dispositifs  didactiques aux différentes réalités sociales et culturelles, et, d’autre part, la transmission ou la construction de référents communs à tous pour permettre à chacun de se mouvoir dans l’univers de l’écrit et les productions culturelles contemporaines. Mais quelles sont les réalités sociales et culturelles dont il faut tenir compte ? Quelles formes de différenciation choisir, pour quels publics ? Quels sont les référents minimaux permettant à tous de construire de nouvelles capacités ?

    Par-delà la nécessaire transmission de certaines normes langagières et de certains standards culturels, il parait plus pertinent d’enseigner la langue et la littérature, la lecture, l’écriture, l’écoute et la parole comme des espaces de variations, donnant lieu à des usages divers, que de chercher à imposer une image unique de ces domaines de connaissance. Il s’agit toutefois de poursuivre la réflexion sur les savoirs enseignés. Tous se valent-ils ? Y a-t-il dans la discipline des savoirs clés ?

    Les démarches d’enseignement-apprentissage de l’écriture, de la lecture et de l’oralité les plus efficaces sont celles qui mettent les élèves en activité, celles qui leur permettent de s’approprier personnellement les savoirs, celles qui s’inscrivent dans un projet qui leur donne sens, celles qui prennent le plus en compte les pratiques socioculturelles extrascolaires et celles qui établissent un va-et-vient entre les savoirs, les savoir-faire et les pratiques institués (posés comme nécessaires par la collectivité) et les savoirs, savoir-faire et pratiques « déjà-là », qui se sont constitués socialement et scolairement. Néanmoins, l’activité d’apprentissage des élèves se situe toujours dans un espace qui ne peut que partiellement faire sens pour l’élève, étant donné que celui-ci ne maitrise que partiellement les situations qui fassent suffisamment sens tout en impliquant un certain dépaysement des élèves. Quels outils proposer, et sous quelles formes, pour soutenir l’élève dans son effort d’apprentissage ? Quelles interactions sociales instaurer dans l’espace de la classe (enseignant-élèves, élèves-élèves) à propos des objets d’enseignement-apprentissage ? En outre, comment réduire les distances culturelles qui existent entre un nombre important d’élèves et le monde de l’écrit ? Dans quelles conditions peut-on mettre en œuvre des médiations culturelles permettant à ces élèves de se familiariser progressivement avec les objets, les lieux, le langage et les concepts de cet univers, et quels effets de telles médiations produisent-elles ? Comment enfin se construit le « déjà-là », le rapport au langage et à la culture qui pilote les comportements et les apprentissages dans la classe de français ?

    Bien que, dans la plupart des programmes, les différents domaines actuellement constitutifs de l’enseignement de la langue maternelle (lire, écrire, parler, écouter, analyser la langue) apparaissent comme séparés les uns des autres, les modèles didactiques montrent de plus en plus l’intérêt de dépasser ces clivages en favorisant l’interaction entre les différents domaines. Mais quelles interactions existent entre lecture et écriture ? Entre écoute et parole ? Entre oral et écrit ? Comment ces interactions varient-elles en fonction des situations de communication et des genres ? Comment se construisent les capacités des élèves dans ces différents domaines ? Quelles interactions instituer en classe ?

    S’il a longtemps été contesté parce qu’il était le lieu de pratiques impressionnistes ignorantes de leurs présupposés épistémologiques et idéologues, l’enseignement-apprentissage de la littérature connait aujourd’hui un fort regain d’intérêt (le nombre de recherches le concernant a doublé entre 1985 et 1993) et se voit réinterrogé sur ses finalités, ses corpus et ses démarches. Constatant la tension qui existe entre, d’une part, l’apprentissage de la lecture et de l’écriture en tant que pratiques sociales s’appliquant aux supports les plus divers et, d’autre part, la connaissance de la littérature en tant que corpus et/ou ensemble de modes d’écriture et de lecture situés dans une histoire et des institutions, les chercheurs de l’association sont partagés sur le traitement didactique à réserver à cette tension : les spécificités du fait littéraire justifient-elles une autonomisation plus radicale de son champ, ou bien plutôt un va-et-vient dialectique entre les démarches centrées sur l’appropriation du fait littéraire et celles qui privilégient le développement de la lecture et de l’écriture ? Plus largement, quels concepts-cadres, quelles pratiques, quels corpus, quelles progressions et quels modes d’évaluation retenir pour développer durablement la lecture et l’écriture, littéraires ou non, des élèves, mais aussi une compréhension des enjeux particuliers et de la dynamique de la littérature ? En amont, comment décrire et évaluer les pratiques et les effets de l’enseignement actuel de la lecture et de la littérature ?

    L’apprentissage de techniques culturelles complexes comme la lecture, l’écriture ou la parole dans des situations formelles implique un haut degré de conscience de ses propres processus psychiques. Ceci pose le problème du rôle des activités métalangagières en classe facilitant la prise de conscience : quelles activités métalangagières mener, à quel moment et sous quelle forme ? Quel est le rapport entre les activités métalangagière et les activités langagières ? Quel statut donner à des activités comme l’analyse grammaticale ou l’analyse littéraire ?

Ces quelques problématiques, esquissées à titre d’exemples, ont déjà fait l’objet d’un travail particulier dans la communauté scientifique animée par l’association DFLM. Les questions qu’elles posent sont loin d’être résolues et elles continuent à faire l’objet de controverses alimentées par de nombreuses recherches, relevant principalement de la recherche-action. Ces recherches sont précieuses et apportent de nombreux éléments pour faire avancer la réflexion. La composante praxéologique et les considérations pédagogiques générales y restent cependant prépondérantes : il convient aujourd’hui d’élargir les données, d’accentuer le contrôle des facteurs en jeu et d’affiner les cadres conceptuels de manière à favoriser davantage la capitalisation des connaissances et l’administration de la preuve.

Corollairement, il parait nécessaire de promouvoir des ensembles de recherches plus dégagés des questions d’action et d’intervention didactique pour mieux connaitre la réalité des pratiques actuelles d’enseignement, pour mieux élucider leur histoire et pour mieux comprendre leur fonctionnement et leur (in-)efficacité. Les domaines de recherches suivants, encore peu explorés, paraissent à cet égard prioritaires :

- Recherches sur les pratiques d’enseignement, plus particulièrement les modes d’élaboration d’objets d’enseignement-apprentissage dans les interactions en classe ;

- À travers des observations transversales et longitudinales, recherches sur les capacités des élèves dans les différents domaines de l’enseignement du français pour comprendre la logique de leur construction et la transformation des rapports au savoir en fonction des données scolaires ;

 - Recherches sur la constitution des objets d’enseignement dans une perspective historique.

Il reste également  à formaliser la diversité des pratiques pédagogiques et à se doter d’instruments d’observation pour en comprendre les réussites et les échecs, et, en amont, à se pencher sur l’articulation des différentes recherches avec la formation initiale et continue des maitres.